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À fille son dû.

Attal abat sa fatwa, crachant à la nana « À bas l'abaya ».

Xi Jinping dit : Flic, si vis T-shirt incivil, d'incisif kriss, inscris « ci-gît » !

En terre perse les sergents de Mehmet enferment les femmes repérées en péché de  mèches rebelles.

Toronto : pognon. Congo : colons. Oxford : bobos. Novgorod : OMON. L'or corrompt ton corps. L'ordo rompt ton dos.

Tu crus sûr un futur ? - pfutt ! D'un Ubu turc, d'un Trump US, tu sus but. Tu chus. Tu bus jus d'un humus brun. Tu fus l'usus d'un club d'urubus du cul.

À fille son dû.

Poème en monovocalismes successivement sur les cinq voyelles, composé après la décision d’interdire l’abaya dans les écoles, officiellement dans un souci de laïcité.
Publié sur la liste Oulipo le 7 septembre 2023.

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Oripeaux

Papin

De Papin
la marmite
lasse vite
tout copain.

En Chopin
tout s'effrite
quand le quitte
sa Dupin.

En surface
tout s'efface,
tout s'éteint.

Quand tout sombre,
au matin,
reste l'ombre.

La liste Oulipo voit surgir un ensemble de poèmes contenant le mot Papin ( Denis ) avec des contraintes diverses. Ici un sonnet de trisyllabes.
Publié sur la liste Oulipo le 3 septembre 2023.

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La porte

Ce matin
je n'étais pas bien.
Je me suis vu couvert de sang
sur les deux mains, sur les poignets, sur les avants-bras.
Comme ça colle, ce sang, comme il résiste au détergent, comme il macule tout.

J'ai filé
vers le lavabo.
Je me suis vu dans le miroir.
Il coulait de mes canines un filet rougeâtre.

Ô vous, dieux
qui me connaissez,
vous qui me savez généreux,

dites-moi :
suis-je un criminel ?

C'est alors

qu'au milieu
d'un torrent de rires

vint vers moi,
dans le frôlement
de son manteau couleur de neige,

un dieu beau
comme le soleil.
Il m'ouvrit, là, dans mon salon,
au milieu du mur, une porte que j'ignorais.

Et je vis
les corps ballotés
aux flots méditerranéens,
les cadavres desséchés au vent fou du Sahel,
les femmes éventrées au milieu des ruines aux poutres fumantes du Dombass.

À genoux,
j'ai vu l'agonie
des non-blancs chopés dans la rue,
des mauvaise femmes, des non-voilées et des gouines,

des Arabes,
Kurdes, Yéménites,
Chinois dénoncés. Tous m'ont dit

Mais pourquoi ?
Ils me regardaient.

Pourquoi toi ?

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Le prix de la vie

Paumée, jamais perdue

L'abeille, chaque jour,
butinait cette treille
où toujours l'on soleille
sous les parfums d'amour.

Aujourd'hui, le cœur lourd,
on la voit qui s'effraye :
des ans, qui l'ensommeillent,
elle entend le tambour.

La muse secoureuse,
intrépide et rêveuse,
fit s'ouvrir tant de fleurs !

Vers elle en souvenance
d'élans, beautés, bonheurs,
chaude reconnaissance.

Petit hommage à Brigitte Célérier qui vient d’arrêter son blog Paumée.

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Systoles

Fati et Marie

d'ici vint
le printemps arabe
cet espoir d'un monde de frères
ici vint la haine et le meurtre envers l'étranger
ici titube Fati que le soleil mord la faim torture la soif rend folle

elle tient
la main de Marie
la petite fille qu'elle aime
qui titube et qui gémit et que la soif rend folle

des soldats
en les injuriant
les ont conduites en camion
sous la menace de leurs armes automatiques
ils les ont forcées à descendre au milieu du désert ils les ont abandonnées

sur le sable
le sable brûlant
leurs pieds nus impriment l'oubli
de cet espoir qu'elles avaient eu d'un lieu de paix

Fati chute
la petite fille
la secoue appelle supplie

puis vient sur
deux corps enlacés

le silence 

Bigollo écrit en réaction à la mort de Fati et sa fille Marie, 6 ans, abandonnées dans le désert par des soldats Tunisiens suivant les consignes du dictateur du pays.

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Oripeaux

Désarrimage

Aux profondeurs du bleu que mire l'eau du lac
j'enfouis mon visage et cette larme amère
dont il se voit salé plus que l'horrible mer
où le vent sans pitié raille et le hauban claque.

Tu as laissé le mont, le névé, le sérac,
où le torrent luisait de son rire de verre,
me quittant pour aimer au pied du vétiver
quelque marin fougueux menant fière caraque.

Je dérive aux ubacs, privé de gouvernail,
écoutant du troupeau le glas de la sonnaille,
cherchant l'accueillant piège ouvert sur un aven.

Et là, pour oublier ton parfum qui m'attire,
et ces lieux habités d'une espérance vaine,
par un ultime envol, comme toi, veux partir.

Peu d’oulipisme pour ce sonnet faisant rimer les féminines avec les masculines.
Publié sur la liste Oulipo le 16 juillet 2023.

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Systoles

Pénombre

Ta voix était chaude.
Tu enseignais tous les chants.
Tu ne chantes plus.

L'infirmière au beau sourire
vient remplir le pilulier.

Les cheveux au vent,
nous menais par prés, par monts.
Tu restes assise.

À ta fenêtre tu guettes
le lent ballet des nuages.

Tu nous apprenais
les noms des fleurs, des insectes.
Ta mémoire est vide.

Le docteur d'une voix douce
lâche le mot dépendance.

Ta cuisine avait
les saveurs de la garrigue.
Le gaz est éteint.

L'homme obscur, au pas de course,
livre le repas du jour.

Tant d'enfants couraient
t'accueillir, te faire fête.
Seule, tu attends.

Des téléphones lointains
calculent ta destinée.

Nous nous sourions.
Quelques bribes te reviennent
d'un bonheur sans hâte.

Le soleil se fait moins dur :
on peut ouvrir les volets.

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Le prix de la vie

Refus d’obtempérer

Il est mort
dans une voiture
fusillé par un policier.
C'est le corps d'un enfant que sa mère aujourd'hui cherche.
Autour vocifèrent les tribuns des hordes brunes, les policiers de la haine.

Un enfant
qui, les yeux levés
vers la montagne de la vie,
comme il pouvait gravissait ignorant le vertige.

Il est mort :
que chacun se taise.
Écoutons le vent qui se lève

et qui chante
l'histoire obstinée

de l'amour.

Le 27 juin 2023, un nouveau tir de policier sur un conducteur pour refus d’obtempérer a provoqué la mort du jeune Nahel Merzouk, 17 ans, à Nanterre. Ce bigollo est écrit en réaction à ce drame.
Publié sur la liste Oulipo le 29 juin 2023.

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Panthéonnade

Cessez de me panthéoniser,
de citer mon nom dans chaque école,
quand près de moi l'ombre se désole
des amis qu'on a martyrisés.

Arrêtez de me canoniser
quand, le cœur froid, perdant l'auréole,
bénissez sous l'or de la coupole
les soldats dont l'arme vous baisez.

Pas question de me nobéliser
quand ces enfants que dealers cajolent
trouvent au creux d'une vapeur folle
des mondes à l'envers irisé.

J'interdis de me gréviniser,
de me planter, grotesque babiole 
de cire, polystyrène et colle,
sous des néons au jour tamisé.

N'allez pas me tabloïdiser
en une de la presse pipole,
comme la merde dans la rigole
que bouffe le lobotomisé.

Non. Laissez moi, le sexe rasé,
fuir gauchement sur ma jambe molle
rejoindre les ratés qui picolent,
moi que vous avez ubérisé. 

Réaction épidermique face à la multiplication des canonisations par le Vatican et des panthéonisations par le gouvernement français.

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Oripeaux

Le héron

Le héron
tourne en rond, maudit.
Très frileux :
« Étourdissement
met en fers !

- N'entrez, mendiant. Trop
frimez. Trotte enfer. »

Poursuivant son travail actuel sur les diagonnets obliques ( textes dont les syllabes, mises sous forme de tableau, peuvent être parcourues d’une seconde façon, en oblique, redonnant le texte initial ) Gilles Esposito-Farèse expérimente une disposition du tableau inclinée à 45°, dans laquelle on peut lire le texte par un parcours en lignes ou en colonnes. Les carrés sur pointe de Gilles m’évoquent une croix. On pourrait penser à allonger les quatre bras de cette croix, comme suit, obtenant un total de 29 syllabes.

                 le
                  é
            ron tour nan
        ron mau  di  trè fri
  le é tour  di  se  man  mé tan fer
        nan tré man dian tro
            fri  mé  tro
                tan
                fer

Le poème qui en résulte est un hypertog, de structure 3+5+3+5+3 + 5+5. J’envisage d’appeler cette variante un croisonnet.
Publié sur la liste Oulipo le 15 juin 2023.

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