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Le prix de la vie

Vie de Badinter

L'homme est un animal qui tue.
Quel est, sabre, là, ce sang humain ?
La tête s'en va, épave sans écho
de peines et d'appels, d'appétits tus.

Lentement le temps s'efface rigolant.
Des virils instincts s'éteint morgue
et l'infini vide s'emplit tout de
millions d'oiselets mourants. Fin.

Robert Badinter est mort la nuit dernière. Dans ce poème le premier vers  reprend une phrase prononcée par lui lors d’un entretien diffusé dans La Grande Librairie, qui m’avait inspiré deux poèmes le 16 novembre dernier.
https://taliporefleuri.fr/2023/11/21/badinter-1/  et https://taliporefleuri.fr/2023/11/21/badinter-2/
En voici un troisième, suivant la contrainte du jeu de la vie.
Publié sur la liste Oulipo le 9 février 2024.

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Oripeaux

Jeu nase

Au commencement, Rien créa le nul et le zéro.

Le zéro était informe et vide, les ténèbres étaient au-dessus de l’abîme et le souffle de Rien planait au-dessus du faux.

Rien dit : « Que l'illusion soit. » Et l'illusion fut.

Rien vit que l'illusion était bonne, et Rien sépara l'illusion des ténèbres.

Rien appela l'illusion « forme », il appela les ténèbres « fond ». Il y eut un creux, il y eut un plein : première forme.

Et Rien dit : « Qu’il y ait un jugement au milieu du faux, et qu’il sépare le faux. »

Rien fit le jugement, il sépara le faux qui est au-dessous du jugement et le faux qui est au-dessus. Et ce fut ainsi.

Rien appela le jugement « beau ». Il y eut un creux, il y eut un plein : deuxième forme.

Et Rien dit : « Le faux qui est au-dessous du beau, qu’il se rassemble en un seul tas, et que paraisse le zéro absolu. » Et ce fut ainsi.

Rien appela le zéro absolu « zéro », et il appela la masse du faux « moins ». Et Rien vit que cela était bon.

Rien dit : « Que le zéro produise le labeur, la science qui porte sa semence, et que, sous le zéro, l’art donne, selon son espèce, l’œuvre qui porte sa semence. » Et ce fut ainsi.

Le zéro produisit le labeur, la science qui porte sa semence, selon son espèce, et l’art qui donne, selon son espèce, l’œuvre qui porte sa semence. Et Rien vit que cela était bon.

Il y eut un creux, il y eut un plein : troisième forme.

Et Rien dit : « Qu’il y ait des dignitaires au jugement du nul, pour séparer la forme du fond ; qu’ils servent de signes pour marquer les fumées, les formes et les apparences ;

et qu’ils soient, au jugement du nul, des dignitaires pour éclairer le zéro. » Et ce fut ainsi.

Rien fit les deux grands dignitaires : le plus grand pour commander à la forme, le plus petit pour commander au fond ; il fit aussi les stériles.

Rien les plaça au jugement du nul pour éclairer le zéro,

pour commander à la forme et au fond, pour séparer l'illusion des ténèbres. Et Rien vit que cela était bon.

Il y eut un creux, il y eut un plein : quatrième forme.

Et Rien dit : « Que le faux foisonne d’une profusion d’idées véhémentes, et que les oiseux vomissent au-dessous du zéro, sous le jugement du nul. »

Rien créa, selon leur espèce, les grands monstres mandarins, toutes les idées véhémentes qui vont et viennent et foisonnent dans le faux, et aussi, selon leur espèce, tous les oiseux qui vomissent. Et Rien vit que cela était bon.

Rien les bénit par ces paroles : « Soyez féconds et multipliez-vous, remplissez le moins, que les oiseux se multiplient sous le zéro. »

Il y eut un creux, il y eut un plein : cinquième forme.

Et Rien dit : « Que le zéro produise des idées véhémentes selon leur espèce, ragots, ratages et rages sournoises selon leur espèce. » Et ce fut ainsi.

Rien fit les rages sournoises selon leur espèce, les ragots selon leur espèce, et tous les ratages du zéro selon leur espèce. Et Rien vit que cela était bon.

Rien dit : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance. Qu’il soit le maître des passions du moins, des oiseux du nul, des ragots, de toutes les rages sournoises, et de tous les ratages qui vont et viennent sous le zéro. »

Rien créa l’homme à son image, à l’image de Rien il le créa, il les créa homme et femme.

Rien les bénit et leur dit : « Soyez féconds et multipliez-vous, remplissez le zéro et égalez-le. Soyez les maîtres des passions du moins, oiseux du nul, et de toutes les animosités qui vont et viennent sous le zéro. »

Rien dit encore : « Je vous donne toute science qui porte sa semence sous toute la surface du zéro, et tout art dont l’œuvre porte sa semence : telle sera votre pourriture.

À toutes les animosités du zéro, à tous les oiseux du nul, à tout ce qui va et vient sous le zéro et qui a souffle de violence, je donne comme pourriture tout labeur vandale. » Et ce fut ainsi.

Et Rien vit tout ce qu’il avait fait ; et voici : cela était très bon. Il y eut un creux, il y eut un plein : sixième forme.

Ainsi furent achevés le nul et le zéro, et tout leur déploiement.

À la septième forme, Rien avait achevé le néant qu’il avait fait. Il se reposa, à la septième forme, de tout le néant qu’il avait fait.

Une série d’échanges ont lieu actuellement sur la liste Oulipo sur le mot « rien » dans la littérature. Inspiré par ce thème, je tente ici ce que j’ai décrit par plaisanterie une « Méthode M + rien avec M=S/V/A ». Plus sérieusement il s’agit d’un homosyntaxisme à partir du début de la Genèse, telle que traduite par l’AELF, en choisissant les mots modifiés afin de coller au thème.
Publié sur la liste Oulipo le 3 février 2024.

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Oripeaux

À supposer… pour rigoler

À supposer
qu'on me demande
que je me rende
au dieu rusé

pour rigoler,
que d'une phrase
pleine d'emphase
on dise olé

va donc clamser
ce jour ou l'autre
sans patenôtre
et sans danser,

je souhaiterais
larguer l'amarre
tenir la barre
sans bords tirés,

laissant des ports
ces murs saumâtres
sombres théâtres
de mes transports,

et droit devant
vers le grand large
mener ma barge
le froid bravant,

les yeux jetant
sur ma boussole,
quand se désole
le vent d'autan

qui se souvient
de l'allégresse
de ma jeunesse
qui ne revient

où, fort et droit,
j'allais en liesse
jouer ma pièce
le verbe adroit

sans voir germer
un fin sourire
sur ma satire
non réprimé

chez les gens bien
qui vous dominent
de l'âpre mine
de l'amphibien,

j'irais au bout
de ma dérive
sur l'eau lascive
au vent debout,

en me tournant
voyant la berge
une ardeur vierge
me reprenant,

lançant un chant
fier et sauvage
rejoindrais l'âge
du jeu méchant

et lors, le front
tendu vers l'onde,
quittant le monde
sans un affront,

par un plongeon
que je m'élance
dans le silence
de l'esturgeon

et, dans la nuit,
que je m'écrase
touchant la vase
et son ennui.

Petite évolution de la contrainte « À supposer… » de Jacques Jouet, qui normalement désigne un texte en prose de 1000 signes au moins formé d’une phrase unique, et débutant par « À supposer qu’on me demande ici de… ». J’ai laissé tomber les deux derniers mots de cette formule. Mais surtout la principale entorse est que ce poème est en vers. Je me suis efforcé d’utiliser des rimes toutes différentes. Toute ressemblance avec un célèbre poème d’Arthur Rimbaud n’est qu’une pure coïncidence.
Publié sur la liste Oulipo le 1er février 2024.

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La ronde joyeuse

Des israélites,
des chrétiens,
des musulmans,
des communistes

poursuivent,
torturent,
violent,
dilacèrent

les israélites,
les chrétiens,
les musulmans,
les communistes

puisqu'on a peur d'eux,
puisqu'ils ne sont pas pareils,
puisqu'ils veulent leur part,
puisqu'ils sont moins forts,

ces israélites,
ces chrétiens,
ces musulmans,
ces communistes.

Dans le ciel,
au dessus des nuages
qu'un soleil mourant colore
d'un rouge sombre,

Yahvé,
Jésus,
Allah,
Marx

dansent une ronde joyeuse.
Et leurs pieds font gicler des gouttes,
des gouttes de sang,
le sang de ces pauvres types,

ces israélites,
ces chrétiens,
ces musulmans,
ces communistes.

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Oripeaux

Seuil

Seuil
haut :
ô
deuil.

Feuille
croc
trop
cueille.

Jouis !
J’ouïs
mort.

Faim
mord.

Fin.

Sonnet de monosyllabes.
Publié sur la liste Oulipo le 21 janvier 2024.

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Poteries

Poteries 2024

Sur la liste oulipo sont lancées quotidiennement des propositions de contraintes qui reçoivent de nombreuses réponses auxquelles j’ai joint ces petits textes.  J’ai commencé par les classer d’après la contrainte utilisée. A partir de 2018 j’ai renoncé à ce classement trop difficile en raison du foisonnement de nouvelles contraintes proposées, et mes contributions sont classées par année.

( Désolé pour la mise à jour retardée. Ça finira par se faire ! )

14 janvier

Sur la liste Oulipo, Pierre Lamy écrit : « La contrerime est un quatrain combinant des rimes embrassées (ABBA) avec une structure métrique croisée (8-6-8-6 par exemple).
Si on y remplace les rimes par des assonances (bulbe/raffut) et si on fait en sorte que les vers impairs contrassonent avec le suivant (bulbe/galbe), on peut composer ce quatrain sans avoir la moindre idée de son thème à partir d’un seul mot-rime. » Voici un petit essai dans lequel l’ajout minimal de syllabes assure la structure de contrerime.

Éloge de la démagogie

D'un thrène
faux
ton trône
fais.

17 janvier

Participation à une salve de « haïkûlorimes » sur le thème de l’hiver par Alexandre Carret.

Mène hiver effroi.
Je l'aime, heureux. Gelé, meurs.
Mai n'y verrai, froid.

29 janvier

Une controverse faisant rage sur la liste au sujet de la textique, à laquelle je suis incapable de participer, et au sujet de la définition du beau, j’ose une petite participation sous forme d’une citation d’un texte qui n’est pas de moi, et d’un commentaire de mon cru :

Un beau poème 

Aussi,
sur le fondement
de l'article quarante neuf,
alinéa trois,
de la Constitution,
j'engage la responsabilité
de mon Gouvernement
sur l'ensemble du projet de loi
de programmation des finances publiques
pour les années deux mille vingt trois à deux mille vingt sept.
Dans ce poème déclamé le 27 septembre 2023 au Palais Bourbon, on note une maîtrise étonnante de la métrique. Les trois premiers vers ainsi que les quatre derniers en boule de neige de syllabes 2-5-8 et 6-9-12-15 encadrent deux quasi-haïkus 5-8-5 et 6-10-6, le second augmenté,  ce qui confère à l'ensemble un équilibre magistral. Une dynamique puissante résulte de l'augmentation moyenne des vers allant de 2 à 15 et s'achevant sur une noble envolée. On note également que l'unique rime féminine est placée sur l'unique alexandrin, accentuant le caractère viril et moderne du poème. À noter l'usage, moderne lui aussi, du double e de « années », ainsi que l'habile partage synérèse/diérèse entre les mots « constitution » et « programmation ».

Si l'on regarde la date 27-9-23 on note que l'on peut classer 25 entre les deux nombres extrêmes tandis que le central a pour carré 81, ce qui justifie la gématrie 2581 de ce texte.

La limpidité du sens de ce beau poème est inégalable, et l'harmonie sensible à sa lecture procure un sentiment de suavité rare dans la littérature du XXIe siècle.

30 janvier

Une floraison d’abécédaires se produisant sur la liste, voici ma participation en monosyllabes :

Ah bé c'est dur

A bu ce doux et frais gin.
Ho, il jouit ! kif ! Las : moût nuit.
- Ô paix que romps sans toi.
- Un vil web X ?
- Yes, zig.

3 mars

Un ouïseaunet, forme inventée par Robert Rapilly.

Geins, Tristan, grogne :
Las, tes cigognes
loin d'Iseut
font leurs œufs.

1er avril

Terine syllabique de circonstance.

Terrine de la mer

Dans le pot
l'eau bout : a
joli son.

D'hameçon
l'oripeau
remua.

Avril à
poasson
fit la peau.

11 avril

Nouvel ouïseaunet.

D'albatros trots,
théâtraux trop,
ailes, belles
elles, cèlent.

25 avril

Pour éviter la luxure
les beautés il ne zieuta.
Se rincer l’œil ? N'en eut cure :
ses paupières il luta.

otremandi :

Au beau corps des elfes,
gourd, haï, j'ai, kid laid, mineur orphique, résisté.
Uvée waxai : yeux zen.

Sur la proposition de Louis Couturier, la liste Oulipo a exploré la notion d’abécédaire syllabique, version de l’abécédaire où les lettres de l’alphabet ne sont pas placées au début des mots successifs mais au début des syllabes successives. Voici ma contribution.

27 avril

La gidouille grammatique, proposée par Alexandre Carret, consiste en deux lignes dont l’une se déduit de l’autre par une permutation en gidouille. La contribution ci-dessous est suivie de la jolie représentation graphique trouvée par Rémi Schulzoù les deux lignes apparaissent selon qu’on la lit de gauche à droite ou de haut en bas.

Rée amour : vie !
Ô mua rêve : ire.
     o
m u
a r
e v
e i
r e

6 mai

Homophonie express.

Dans son super plumard,
boit, mange, fait son lard,
sans révéler au monde
la bourse qu'il a ronde.

Moralité :

À beau lit, bibe l'eau, dîne, a nid. Tait son or.

7 mai

Séquence vocalique.

Iahvé nu

Israël qui t'a élu l'instance du final feu ?

11 mai

Robert Rapilly a proposé l’idée de « pitretitre », dans lequel « une forme poétique figure dans le titre, lequel est un calembour expliqué par les vers qui s’ensuivent ». Ici, la contrainte est la terine.

Terine habit tait

Sur cette île vierge
ne me parle pas
du manteau que porte.

Nul toit nulle porte.
Sous la vigne vierge
l'on ne me voit pas.

Ne trouble mon pas
nulle voix qui porte
et mon âme est vierge.

12 mai

Homophonie express.

Aimant ses doigts ailés,
il prend en ses chaussettes
cachées force pépètes :
veut appas dévoilés.

Moralité

Deux mains d'elle. Aux bas le rouble. Hanche il acque en pagne.

14 mai

Nouveau « pitretitre » : voir description au 11 mai. Le titre peut se lire « Abaissez der des der »

Abécédaire d'eider


Ah beau combat des épatants Français ! Guerriers hardis, ils jetteront kaiser, la macreuse nullarde. Oh par quelle rouerie subissent tranchées un vénéneux wargame (xénisme...) ? - Ypérite, zigomars !

23 mai

Le poème ci-dessous, outre l’isocélisme, présente une structure en 5/7/5 lettres. Alain Chevrier a nommé de tels micropoèmes, de façon joliment autoréférentielle, « HAIKU / MINIATU / RISES ».

Roi nu,
respire
et rit.

27 mai

Tenté et net

N'a ta soif, toi Dieu, or ? -- Bestial pactole, na!
Âne, lot ça plait ? S'ébroue idiot : -- Fi, ô Satan.

28 mai

Participation à un travail des Oulipotes sur l’englyn, une forme courte en honneur chez les poètes gallois.

le vieil homme s'est assis un moment
calmement sans soucis
de ses gestes imprécis
chasse les jours rétrécis

29 mai

Un second englyn, dans lequel on tente de respecter les contraintes d’allitérations que s’imposaient les poètes Gallois. Les consonnes répétées à chaque vers sont les suivantes :
Vers 1 : LKF ; vers 2 : PRLF ; vers 3 : KVZ ; vers 4 : SSN.

Celle que frôle, divine, il confond,
par le fond, perle fine
avec vase que voisine,
et sasse une ire assassine.

12 juin

Sur une idée de Louis Couturier, les Oulipotes étudient actuellement des textes « intransitifs » , c’est-à-dire qu’on y trouve des vers ou des mots vérifiant une relation A < B < C < … < M < A en un certain sens de l’inégalité < : longueur des mots dans les vers, ou comme ici cumul des comparaisons lettre à lettre des mots pour l’ordre alphabétique. Ainsi :

la +3= France +1= adore +1= le +2= nazi = l’ = as = de = fade +3= affable +1= la

Ici, on essaie une mise en œuvre de l’inégalité au sens large <= dans un texte dont le lien avec l’actualité électorale n’est pas fortuit.

Note : « fade » est un substantif argotique pour plaisir sexuel.

La France adore le nazi,
l'as
de fade affable.

Une illustration graphique m’a été offerte par Gilles Esposito-Farèse qui consacre actuellement un important travail à cette nouvelle contrainte : Une flèche relie un mot à un mot lui étant inférieur ( au sens ci-dessus ) et une absence de flèche représente deux mots de valeur égale. La voici :

27 juin

Quelques membres de la liste se sont penchés sur les textes usant de niveaux élevés de parenthèses à l’imitation de Roussel. Le texte ci-dessous est une contribution à cet échange.

Confusion

J'ai,
car...
Trop
qu'on...
Mais
crient!
Très!
Plus!
- Dit :
quand ?

L'ouït
sourd,
qu'ours
fort
sot,
qui
croit
tôt.
Veuf,
bu.

Pour reconnaître ici une contribution au sujet des parenthèses, il faut enlever toutes les ponctuations et mettre une parenthèses ouvrante avant chaque mot de la première strophe, une fermante après chaque mot de la deuxième strophe.

J'ai
(car
( trop
( qu'on
( mais
( crient
( très
( plus
( dit
( quand

l'ouït )
sourd )
qu'ours )
fort )
sots )
qui ? )
croit )
tôt )
veuf)
bu

Remis en ligne ça donne

J'ai (car ( trop ( qu'on ( mais ( crient ( très ( plus ( dit ( quand l'ouït ) sourd ) qu'ours ) fort ) sots ) qui ? ) croit ) tôt ) veuf ) bu

peut-être plus lisible en désimbriquant les parenthèses :

J'ai bu (car veuf ) ( trop tôt ) ( qu'on croit ) ( mais qui ? ) ( crient sots ) ( très fort ) ( plus qu'ours ) ( dit sourd ) ( quand l'ouït )

22 août

Une charade à tiroirs, répondant à d’autres émises sur la liste oulipo.

Mon premier, de presse
magnat, enrichit fort peu
ses feuilletonistes.

Par son déhanché
mon second ravit les dames
et les demoiselles.

Le Teuton se gausse
en découvrant mon troisième
en pareil endroit.

Pour le caribou
mon quatrième, en riant,
vient sonner l'alerte.

Tel le semainier
mon tout livre son mystère
à qui sait l'ouvrir.

… et sa solution

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Journal 2024

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31 décembre : La sonde Parker frôle le soleil.

du soleil dansait 
au milieu d'un flot d'étoiles
la robe de feu

l'amant tout autour valsait
pris en l'étreinte sournoise

30 décembre : Les talibans interdisent les fenêtres qui permettent de voir les femmes

j'aimais voir le ciel
par les fenêtres ouvertes
l'oiseau me parlait

j'aimais à rire et chanter
quand le monde était ami

29 décembre : Robert Brooks, détenu noir, battu à mort aux États-Unis.

un homme à peau sombre
on peut s'amuser avec
aux poings ou aux pieds

commodément on l'étrangle
après usage on le jette

28 décembre : Elon Musk appelle à boycotter Wikipédia qu’il accuse d’être woke.

de ses doigts d'argent
le haineux veut arracher
l'arbre du savoir

les aimants en cercle gardent
racines et floraison

27 décembre : commémoration du 20ème anniversaire du tsunami.

du fond des abysses
elle s'avance la vague
pleine de colère

un grondement la précède
à sa suite le silence

26 décembre : Triste Noël en Orient.

pêle-mêle blocs
pans de murs fragments de voûtes
et crâne au milieu

se campe un petit sapin
guirlande boules étoile

22 décembre : 22e anniversaire du vote par lequel Mayotte est restée colonie française.

une colonie 
refusa d'être vendue
au roi des escrocs

lors sous le joug des puissants
la servitude et l'horreur

21 décembre : solstice d’hiver.

tu t’es endormie 
sous une mantille blanche
ton cœur fait silence

dessus ton front ma caresse
trace des mots éphémères

20 décembre : Epilogue de l’affaire de Mazan : les violeurs condamnés.

profanant la femme
l'homme fait d'elle et de lui
égal immondice

la femme en sa dignité
élève l'humanité

19 décembre : Nicolas Sarkozy condamné à de la prison ferme.

hissé dans le ciel
il a terni les étoiles
emboué l'azur

que mage aux ailes factices
redevienne être de fange

18 décembre : La catastrophe de Mayotte fait ressortir le problème crucial du manque d’eau.

du fond des ténèbres
jaillissait vive et limpide
notre mère l'Eau

ô déesse disparue
avec Toi meurt notre rire

17 décembre : Les chercheurs de l’INRAE sont l’objet des attaques des paysans de la FNSEA.

Ces tiges fragiles,
ces insectes balbutiants ,
ces sources rêveuses,

lequel les aime et protège ?
Et la guerre faisait rage.

16 décembre : La miss France 2025 a été désignée.

maillots et paillettes
la cérémonie inflige
jambes et poitrails

et les femmes sont livrées
mangeaille emballée sous vide

15 décembre : Cyclone catastrophique à Mayotte.

Paradis des fleurs,
île où chantent les parfums.
Enfer pour vous, pauvres.

La mort danse avec le vent,
le déluge vous maudit.

14 décembre : Macron a nommé Bayrou premier ministre.

dans un donjon morne
un petit marquis remue
de grises pensées

dehors loin de son regard
oublié souffre son peuple

13 décembre : En France en 2024 on licencie des enseignants contractuels, laissant les enfants sans profs.

dans ce pays-là
il n'y avait pas école
et ce pays-là

avait changé les enfants
en fontaines asséchées

12 décembre : Donald Trump promu personnalité de l’année.

Comment désigner
l'homme le plus important ?
Sur un lit de fange
déverser un monceau d'or,
pétrir et napper de sang.

11 décembre : Une lettre du poète russe Artiom Kamardine écrite du fond de sa prison.

la bouche murée
le stylo carbonisé
le regard broyé

l'aède stérilisé
sera mis sous vide d'air

10 décembre : Début du procès de Christophe Ruggia pour agressions sexuelles sur Adèle Haenel.

les palombes passent
heureuses dans le ciel pur
l'homme est à l'affût
le hasard choisit la proie
un crachat de plomb
déchire le corps gracile
chasseur tu es fier

dans l'encens du thym sauvage
l'oiseau chavire et se tait

9 décembre : Discours de Han Kang recevant le prix Nobel de littérature.

la plume envolée
capricieuse au gré du vent
caresse la feuille

caresse les yeux qui lisent
caresse l'âme éplorée

8 décembre : Liesse en Syrie après la chute du dictateur.

couvrant le désert
une pluie fraîche réveille
verdure et calices

d'une danse ivre et légère
les petits joignent le ciel

7 décembre : Réouverture de Notre Dame de Paris devant un parterre de chefs d’états.

mère crucifiée
accueille les assassins
les rois les tyrans
les menteurs et les tricheurs
les capitalistes

arrache leur cœur de pierre
sauve les d'un chant d'amour

6 décembre : Grève et manifestations des fonctionnaires malmenés par le gouvernement.

ils croyaient servir
aux jeunes aux vieux aux faibles
donner tout leur cœur

leur salaire c'est l'injure
leur avenir c'est l'opprobre

5 décembre : Annonce de la mort de Jacques Roubaud. Un trident palindrome.

Roubaud, né rêvé, 
là, levé,
rendu, a bu or.

5 décembre : Discours d’Emmanuel Macron après la chute de son gouvernement.

« E. Macron étalé ! »  bêla ténor camé. 

4 décembre : Le gouvernement Barnier est renversé par la motion de censure.

Labourons, hersons !
Mettons à nu les racines
des plants parasites !

Quand lèveront nos semences
quelle fête, les amis !

3 décembre : Bernard Arnault a été élu à l’Académie des sciences morales et politiques.

gagnée ou volée 
fortune se fait morale
juste ou criminelle
guerre se grime en raison
bâillons deviennent sourires

2 décembre : L’extrême droite fait main basse sur le groupe de presse Bayard.

Que le Christ, en croix,
expie un amour stupide
pour les pauvres mecs.

Que l'homme soit muselé
et que l'Argent fructifie.

1er décembre : Lu un article sur un hôpital de fortune au cœur de la jungle birmane.

au fond de la jungle
sans fin la vie obstinée
résiste et chemine

l'amour s'arcboute et répare
les corps désarticulés

30 novembre : Les djihadistes et leurs alliés prennent Alep.

Bachar et ses troupes,
les Djihadistes, les Russes,
et le Hezbollah.

Homme, Baal boit ton sang.
Femme, Moloch prend ta chair.

29 novembre : L’abrogation de la loi sur les retraites sabotée par les députés partisans du gouvernement.

toutes ces année
de labeur t'auront valu
le rire de ceux

qui jouent au poker menteur
assis sur ton dos courbé

24 novembre : Mobilisation des écrivains pour défendre Boualem Sansal arrêté par le régime algérien.

dans la nuit saumâtre
le rossignol a lancé
un chant de lumière

et les bêtes carnivores
en rage l'ont pourchassé

23 novembre : À la COP 29, la prise en compte du genre se retrouve contestée par plusieurs pays.

Derrière la porte
d'Eden, l'arbre de la Vie.
Homme au loin chassé,
reprends la main de la femme.
Dans la paix sera la clé.

22 novembre : Trouvé l’annonce d’une exposition « Chaque vie est une histoire » au palais de la Porte Dorée, retraçant la vie de deux cent vies de migrants.

celui qui voyage
entre par la porte d'or
sourit et raconte

le deuil la route le rêve
les fatigues l'amitié

21 novembre : Les enfants sans abri sont toujours plus nombreux.

sous un toit chaudet
savoir l'orage impuissant
la nuit caresseuse

rire à une mère aimante
étreindre un père très doux

20 novembre : Le gouvernement a décidé de vendre « 60 Millions de Consommateurs » au privé.

le roi de ce fief
a vendu ses beaux jouets
pour aller danser

les courtisans ont crié
la musique a peu de charme

le roi de ce fief
a vendu ses ors ses diams
pour aller danser

les courtisans se sont plaints
car ça manquait de lampions

le roi de ce fief
a vendu ses fiers palais
pour aller danser

les courtisans ont raillé
que le buffet était chiche

le roi de ce fief
a vendu bois champs et bourgs
pour aller danser

les courtisans fustigèrent
l'emballage des cadeaux

le roi de ce fief
a vendu tous ses sujets
pour aller danser

les courtisans s'éclipsèrent
alors il dansa tout seul

18 novembre : Les USA autorisent les Ukrainiens à utiliser des missiles à longue portée en territoire russe.

quand vient l'assassin
l'homme de paix saisit l'arme
il commet le meurtre
et quand l'horreur est stoppée
tombant à genoux
il pleure il se tord les mains
suis-je criminel
et le reste de ses jours
marchant intranquille

il cherche à se rappeler
la pureté de l'enfance

17 novembre : Nouveaux bombardements, nouvelles errances de Palestiniens en fuite.

gravats et poussière
pas d'arbres d'herbe de fleurs
tout au long des jours

d'enfants l’œil dur noir sans larmes
voit un monde sans oiseaux

16 novembre : Un squelette de dinosaure vendu 6 millions d’euros.

trois fois le marteau
l'apatosaure est adjugé
pour plusieurs millions

ivresse du puissant riche
qui peut acheter les siècles

15 novembre : Rapport du Secours Catholique sur la pauvreté : la solidarité s’éloigne. Un hypertog.

il a faim et froid
vêtu d'un vieux manteau gris
les aimants attirent
mais sa main tendue éloigne
aide toi toi-même
car le ciel doit s'occuper
des sphères célestes
et dans son vieux manteau gris
l'homme qui a froid
se rappelle un bon sourire
se rappelle un bon repas

14 novembre : Aux États-Unis, les gens collent des post-it dans le métro.

mon petit post-it
sur le carreau d'un mur froid
est feuille d'un arbre

aux mille touches de couleurs
bruissant au vent de l'espoir

13 novembre : Trump commence à dévoiler son futur gouvernement.

sur les grandes plaines
sur les monts couleur d'aurore
les buildings de verre

règneront muscles et couilles
fusils et crypto-dollars

12 novembre : En Chine, virée nocturne de milliers d’étudiants à vélo.

grincent les pédales
résonnent les voix joyeuses
tintent les sonnettes

kilomètres d'amitié
c'est la fête dans la nuit

11 novembre : Départ du Vendée-Globe, tandis que dans la manche les cadavres de migrants sont rejetés par la mer.

1

Le vent, l'eau, le sel,
les profondeurs silencieuses.
Vagues et fureur.

De l'homme la solitude,
s'enfonçant au creux des heures.

2

Le vent, l'eau, le sel,
les profondeurs silencieuses.
Vagues et fureur.

De l'homme aux yeux la folie,
qui perçoit enfin le havre.

10 novembre : On a fêté les 35 ans de la chute du mur de Berlin.

par la brèche ouverte
un vent fort un vent sonore
chargé de pollen

s'est répandu sur la ville
dont les fleurs ont embaumé

9 novembre : Hier à 16h48 les femmes ont commencé à travailler gratuitement.

salaires égaux
congé pour les deux parents
femmes mieux payées

lois égaconditionnelles
recours au travail flexible

8 novembre : Annonce de la mort de la résistante Madeleine Riffaud.

nous nous souvenons
de ceux qui restant debout
un poème aux lèvres

ont fait au cœur des ténèbres
arc-boutés luire la flamme

7 novembre : Un rapport alarmant de la Défenseure des droits sur la situation dans les prisons françaises.

Toi, le détenu,
tu n'es plus qu'un corps sans âme
derrière la porte.

Nul ne voit ta meurtrissure.
Tu geins : l'écho dit « Expie »

6 novembre : Aux USA c’est Trump qui a été élu.

se taisent les flûtes
se brisent les violons
et les clarinettes

des bottes le rythme lourd
pleure biche fuit mésange

6 novembre : Un plan social est annoncé chez Auchan.

ballet des caddies
labyrinthe des rayons
caisse enregistreuse

un hyper s'est effondré
s'élance la farandole

5 novembre : Le prix Goncourt a été attribué à Kamel Daoud pour Houris.

dire l'innommable
dire les consciences sales
dire la hideur

quand l'homme en fauve s'habille
quand tout est perdu dire non

4 novembre : Le roi et les dirigeants d’Espagne conspués et couverts de boue par les sinistrés en colère.

couvrons-nous de boue
nous dont les yeux sont fermés
car la mort est là

son cortège reptilien
parcourt nos corps endormis

3 novembre : Échec de la COP 16, il n’y avait plus le quorum pour poursuivre.

Où sont-ils allés ?
Ils vont prendre leur avion.
Tant pis pour la vie.

Pas de biodiversité :
ils ont repris leur avion.

2 novembre : La loi sur l’autodétermination de genre adoptée en Allemagne.

Le soleil voulut
être l'astre de la nuit;
la lune, du jour.

Dieu n'y avait pas pensé.
Vit que cela était bon.

1er novembre : 50 ans après Joachim Séné retrouve le lieu où Perec mena sa tentative d’épuisement d’un lieu.

Le lieu : un café.
En ce lieu la tentative
d'un épuisement.

Les choses, les gens, le temps,
les voitures, les nuages

31 octobre : Acquittement du septuagénaire ayant tué sa femme pour abréger ses souffrances à sa demande.

De tes mains, la mort,
tu l'as offerte à l'aimée,
de tes pauvres mains.

En sa chair dilacérée,
par ton amour, vit l'aurore.

30 octobre : Une lettre intersyndicale dénonce le mépris envers les fonctionnaires du gouvernement qui pernd sans concertations une série de mesures scandaleuses.

Tu rames, tu rames.
Le garde-chiourme te guette.
La galère grince.

Si tu faiblis, à la mer !
La rame toque le glas.

29 octobre : L’UNWRA qui secourt les réfugiés palestiniens interdite par Israël.

il y a des cœurs
qui n'ont pas appris à battre
pour les malheureux

leur sinistre pulsation
fait couler un sang glacial

28 octobre : Miss Nord-Pas de Calais attaquée sur les réseaux sociaux par les racistes.

nous voulons des fesses
des corps bien foutus
dociles déesses
en roses tutus

mais point de peau sombre
de cheveux crépus
confinez à l'ombre
vos rêves rompus

27 octobre : Israël attaque l’Iran.

d'un pitbull sanglant
les soldats tous azimuts
attaquent en meute

son fier pénis à la mort
offre d'enfants myriades

26 octobre : Le marché de la croisière s’emballe.

Le troupeau s'embarque
dans un achélem flottant :
Vive l'aventure !

Mille identiques cellules
de port en port anonymes.

25 octobre : Paul Watson, le défenseur des baleines, reste en prison au Groenland.

la baleine est morte
l'argent va de main en main
l'homme est en prison

la banquise a dégelé
l'océan s'est dépeuplé

24 octobre : Condamnation d’une mère qui avait laissé seuls ses quatre enfants.

les yeux dans le vague
elle danse encore un peu
danse en oubliant
les enfants le frigo vide
les couches la merde

elle danse vit s'envole
reine d'un rivage bleu

19 octobre : Lourd bilan d’un épisode cévenol qui a ravagé plusieurs départements.

je glisse en silence
transparente et j'attends l'heure
l'heure de colère

alors brutale hurlante
ruinerai l'ordre où j'étouffe

18 octobre : Selon un rapport de l’ONU, il y a plus d’un milliards de pauvres.

le mec sale et triste
qui n'a pas de quoi manger
a qu'à s'asseoir là

on a pas de temps à perdre
pour ceux qui servent à rien

17 octobre : Hier arrivée dans les camps de rétention installés en Albanie des premiers migrants victimes du protocole Italie-Albanie.

Rendus fous de peur 
ils ont fabriqué des cages
aux barreaux pointus

pour y fermer leurs démons
et s'y sont fermés eux-mêmes.

16 octobre : Début de la campagne de vaccination contre la grippe et le COVID.

masques et seringues
quand l'hiver frappe à la porte
réveillent nos peurs

tout petits devant la Vie
qui affole les boussoles

15 octobre : Les collèges et lycées ont observé une minute de silence en mémoire de Samuel Paty et Dominique Bernard.

le professeur voit
dans le regard de l'élève
une étoile naître

il peut mourir peu importe
s'embrase un grand firmament

14 octobre : Un couple d’israélien, elle juive, lui palestinien, témoigne de la difficulté des pacifistes.

Celui qui a dit
« Que la paix soit avec vous »
est un terroriste.

Coups ! Menottes ! Garde à vue !
En Palestine, l'hiver.

13 octobre : Rapport alarmant du WWF sur la disparition des animaux sauvages.

le chant des oiseaux
la cavalcade des cerfs
les fourmis hâtives

tout s'est un jour arrêté
seule l'horloge tournait

12 octobre : 4000 postes en moins dans les écoles.

dans l'école vide
la poussière se dépose
sur les tables sages

un cahier traîne fermé
l'oubli d'un enfant perdu

11 octobre : Le prix Nobel de littérature a été décerné à Han Kang, autrice sud-coréenne.

La plume trempée
dans le noir d'une encre acide
devient lumineuse.

C'est en pleurant que les yeux
qui la lisent voient le monde.

10 octobre : Le film Niki de Céline Sallette vient de sortir.

dansez les nanas
rondes colorées et vives
les hommes vous voient

et la semence violeuse
se fait galaxie et joie

9 octobre : Le prix Nobel (de physique !) a été attribué à deux pères de l’Intelligence Artificielle.

Des savants ont mis 
les robots intelligents
tout autour de nous.

Ils fabriquent un bonheur
où nous glissons oublieux.

8 octobre : Hier l’anniversaire de l’attaque du Hamas contre Israël a occulté deux autres anniversaires : celui de Poutine, et celui du meurtre d’Anna Politkovskaïa.

Pour avoir sa tête
le tsar n'eut pas à danser
comme Salomé.

Son cadeau d'anniversaire :
Anna Politkovskaïa

7 octobre : Anniversaire de l’attaque du 7 octobre par les combattants du Hamas.

Qui de ces humains
a fait des bêtes sauvages
tueuses violeuses ?

Qui oubliera le jour où
de mille mains vint le meurtre ?

6 octobre : La France de Retailleau se rapproche de l’Italie de Merloni sur l’immigration.

Franco-italien
sera l'axe du rejet
des hommes qui migrent.

Les justes ouvrent les bras
criant « Pas en notre nom ! »

5 octobre : Début du champagne Taittinger made in UK.

Danseront les bulles
sur une terre du nord
et, sur le coteau,

la jachère envahira
nos cœurs pris de sécheresse.

4 octobre : En Patagonie, une éclipse solaire offre le merveilleux spectacle d’un « anneau de feu ».

Lève au ciel tes yeux.
Vois dans la nuit qui s'abat
cet anneau de feu.

C'est l'alliance de Baal
pour sa noce avec le Monde.

3 octobre : Israël dans une fuite en avant vers la guerre.

Plus de guerre encore,
et ta popularité
remonte ! remonte !

Longue vie au spadassin !
Buvons ! Mangeons le boudin !

2 octobre : Mort d’Éric Angelini, membre éminent de la liste Oulipo. Contrainte du beau spectre ( mélange de beau présent et du bel absent )

Gai, n'ira glacial

Ange à ciel égal,
gagnera le cercle large
l'anar génial.
L'encrier régénéré,
il égara clé,
incarna le crâne élan ;
rang à rang gicla
en ce carnage incarné.
La grâce narra.

L'arc érigé relia
le régal en l'acéré.

1er octobre : Un article de l’UNICEF décrit les conséquences des guerres Netanyahennes pour les enfants. Un hypertog :

Lorsque tu mourras
-car tu mourras bien un jour-
on te construira
pour célébrer tes mérites
un grand mausolée,
en utilisant les pierres
des ruines de toutes
les maisons des innocents
que tu as tués.

Pour décor : milliers de crânes
d'enfants en fière guirlande.

30 septembre : L’extrême droite remporte les élections en Autriche.

Géante et trop belle
la vague au reflet cruel,
la vague mortelle,

fond vers nous telle immense aile,
nous gifle, nous tord, nous gèle.

29 septembre : Netanyahou bombarde Beyrouth pour assassiner Nasrallah.

Il a tout réglé
par la honte et par la ruine,
l'horreur et la mort.

À lui s'ouvre un paradis
que baigne un fleuve de sang.

28 septembre : Le député Sébastien Peytavie dépose un projet de loi pour le remboursement intégral des fauteuils roulants.

on s'est aperçus
sans trop en croire nos yeux
que tu existais

il a fallu partager
nos rires et nos tendresses

27 septembre : Deux écologistes anglaises condamnées à deux ans de prison pour projection de soupe sur un tableau de Van Gogh ; immédiatement de nouveaux écologistes refont le même geste.

le peintre est heureux
nature et violence ensemble
sur la toile dansent

pourquoi la prison dit-il
quand mon art les rend fertiles

26 septembre : Polémique indécente sur les OQTF, à coup de chiffres sur leur nombre et le nombre de leurs mises en application.

tu voulus lever
une aube à ton horizon
redresser la tête

cheptel tu es numéro
d'une grise statistique

25 septembre : Loïc Résibois qui, atteint de la maladie de Charcot, s’est tant battu pour le suicide assisté meurt après une sédation profonde.

l'homme qui souffrait 
ouvre la porte sans bruit
et prend le chemin

un oiseau sur son épaule
chante et tout devient lumière

24 septembre : Israël étend la guerre au Liban.

Jehovah chevauche
sa mitraillette à la main.
Allah tire à vue.

Le Dieu d'Amour et ses prêtres
chargent bravant la mitraille.

23 septembre : Inondations catastrophiques au Tchad et au Niger dans l’indifférence générale.

Laissons-les crever !
Quand l'eau submerge la steppe,
coupons la télé.

Le désert dans notre cœur,
lui, sera toujours aride.

22 septembre : Un gouvernement a fini par être constitué.

D'un président dupe
ce ministre fut le traître.
Sur ses électeurs

ce président privé d'âme
règne en médiocre autocrate.

21 septembre : Le commissaire, dont les ordres ont amené à la port de Steve Maia Caniço, est relaxé.

Contre la musique 
envoyez les lacrymos.
C'est l'ordre normal.

Ne glisseront dans le fleuve
que rêveurs improductifs.

20 septembre : L’inquiétude face au retour des sans-abri après les jeux olympiques.

ce n'est pas pour vous
qu'en la vasque scintillait
le feu de la paix

les athlètes sont partis
hères vous revient la nuit

19 septembre : Achat mirobolant de vignobles de Bourgogne par le groupe LVMH

ils ont acheté
le vin la beauté la joie
leurs actions s'envolent

leur ordinateur ondule
fleurs à l'églantier se fanent

18 septembre : On vient de retrouver dans le sol de Notre Dame de Paris le cercueil de Du Bellay.

sa plume envolée
le poète chevauchait
la mort à ses trousses

repose en la cathédrale
ses vers galopent sans fin

17 septembre : Une terine pour l’anniversaire de la mort de Mahsa Amini.

Se lève la femme,
se lève et la vie
devient liberté.

Chère liberté  !
Tant chère que femme
lui donne sa vie.

En donnant la vie
à la liberté
s’accomplit la femme.

16 septembre : À la rubrique Planète, le journal Le Monde liste une série frappante de catastrophes.

Sur le feu, sur l'eau,
sur la terre, sur le vent,
l'homme était vainqueur.

L'équation n'était pas juste.
Au matin périt la terre.

15 septembre : Un documentaire raconte l’odyssée d’un éléphant de foire.

D'un pas lent et digne
marche sous les quolibets
l'animal de foire.

Le souvenir du soleil
le berce en son désespoir.

14 septembre : Nombreux rassemblements en soutien à Gisèle Pelicot, droguée et livrée par son mari aux violeurs.

Que l'éros est beau.
Que la tendresse agrandit
la fête limpide.

Quand la fange est carnassière
que fuse et chante l'amour.

13 septembre : Les inspections générales cherchent à faire baisser les nombres de postes dans les écoles et à fermer des écoles.

à la porte close
de l'école silencieuse
l'enfant se détourne

l'argent coule dans les veines
de l'homme le rêve est mort

12 septembre : Le débat Trump-Harris tourne à l’avantage de Kamala Harris.

le plafond baissait
les murs se rétrécissaient
soudain vague roule

le bourreau croule s'effondre
n'était qu'un moulage en sable

11 septembre : Nombre record de demandes de logements sociaux.

avoir une chambre
regarder par la fenêtre
le jour qui se lève

dans sa poche avoir la clé
rire en pensant à demain

10 septembre : Déchaînement de remarques méprisantes de la droite sur l’élocution d’un député de gauche.

haussant le menton
le mépris tordant sa bouche
un homme important

tout dégoulinant d'orgueil
croyait les hommes petits

9 septembre : Les EHPAD en grande difficulté.

dans les longs couloirs
qu'il arpentent à pas lent
au milieu des ombres

une parole adressée
réveille en eux le sourire

8 septembre : Un article sur les remarques qui blessent les personnes en fauteuil roulant m’a inspiré.

À coups de marteau
brise la gangue où tes yeux
ne voient que grisaille.

Alors paraît la statue
où le sculpteur mit son âme.

7 septembre : Manifestations dans toute la France contre le coup de force de Macron refusant le verdict des urnes.

Nous n'acceptons pas
que le mépris nous gouverne,
qu'on pipe les dés.

Déjouons le coup d'état.
Ensemble sans peur marchons.

6 septembre : Les négociations Netanyahou-Hamas ont encore capoté : la faute au couloir de Philadelphie.

Où va le couloir
qui se nomme « Amour du frère » ?
Ô douleur. Ô honte.

Couloir de Philadelphie,
mène au feu de la Géhenne.

5 septembre : Spectacle navrant d’un président à la dérive.

La cinquième dynastie

Il y a eu le Grand Charles
puis Georges le raffiné,
Valéry le joli marle,
François le roi du faux nez,

et Jacques le fort en gueule
et Nicolas l'hystéro.
Puis, après François le veule,
Emmanuel le zéro.

4 septembre : La détention provisoire au Groenland de Paul Watson, fondateur de Sea Shepherd, poursuivi par le Japon pour s’opposer aux pêches illicites à la baleine, est prolongée de 28 jours.

Quand elle mourra,
noyée en ces flots d'argent
dénués d'odeur,

la baleine dépecée
murmurera : « C'est la loi. »

3 septembre : Lu sur le site de l’UNICEF un témoignage poignant réalisé par Brut sur les enfants-soldats.

De ses grands yeux  neufs
il regardait l'oiseau vert.
On les a bandés.

Il n'a plus connu que fer,
rocs, cris, hasch, feu, boue, crocs, tripes.

2 septembre : L’un des frères Gao, figures de l’art contemporain engagé, a été arrêté en Chine.

l'art est un ressac
vague après vague il se brise
au pied des murailles

de sa fervente agonie
naît la vitale splendeur

1er septembre : Il y a deux jours la réfugiée afghane Zakia Khudadadi a remporté une médaille de bronze aux jeux paralympiques.

fille au bras manquant
fille que l'on veut tuer
fille qui s'enfuit

cette braise dans ton cœur
enflamme une aurore neuve

31 août : L’armée israélienne attaque la Cisjordanie, pendant qu’on tente d’enrayer la propagation de la polio à Gaza.

Quand ils assassinent
ne sois pas antisémite :
ravale tes larmes,

poings dans les poches détourne
tes yeux de l'enfant qui meurt.

9 juin : Les élections européennes nous aspergent de boue.

Non ne pleure pas
quand de brun chacun s'habille
et que vient l'automne.

Lève les bras vers le ciel,
fais pleuvoir l'eau qui ressource.

6 mai : Mort de Bernard Pivot. Un petit hommage en forme de médaille :

Du monde, Pivot,
bascule en l'éternité :
le néant vaut pis.

1er mai : Un tanka

Que peut le muguet ?
Qu'espère un peuple en fureur
d'un preux enfumeur ?

Gueux : heures sup, tune en berne.
Chefs : pécule, sel et beurre.

1er avril : Terine syllabique de circonstance.

Terrine de la mer

Dans le pot
l'eau bout : a
joli son.

D'hameçon
l'oripeau
remua.

Avril à
poasson
fit la peau.

8 mars : Journée internationale des droits des femmes. Une belle absente publiée dans le recueil Ouvrir.

La nature des choses

Bravant le cac quarante au jeu ? Pschitt : dégommée !
Pdg (favoris, cils charmants) jusqu'au bout
va t'agonir parce qu'objet fol tu déchois.
Chante avenir blafard qu'ange en jupon suivra
tandis qu'on voit fringant champion jaillir d'un bond.

19 janvier : Apostrophé par un importun. Réponse par un homovocalisme sur un poème célèbre ( entaché d’un clinamen facilement évitable ) :

Chancre

Et d'unique corbeau les tempêtes marinent.

1er janvier : Une nouvelle année commence :

Mort à 2023, vive 2024

2023

Ah l'an
hâlant
à lanc
allant.

Hue ! Lents
uhlans
eut l'an
hu'lants.

Hi ! Lent,
il, en
île, en
hie l'an.

Hall : han !
Aule : han !
Au lent
haut, l'an

2024 !

Hélant
élan,
aie l'an
ailant.


... pour de meilleurs vœux à tous.

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Systoles

L’araigne

Qu'un grêle silence en mon âme règne,
implacable araigne et qui rôde et rit.
Nulle souvenance hélas ne s'inscrit
en mon cœur gommé qu'un vent morne baigne.

Ô gel sibérien, méchante duègne
qui ne vient semer, de son doigt proscrit,
dans ma tête rien, en ce jour suri,
qu'un grêle silence. Implacable araigne.

Nulle souvenance en mon cœur gommé.
Ô gel sibérien qui ne vient semer
dans ma tête rien qu'un grêle silence.

Nulle souvenance. Ô gel sibérien !
Dans ma tête, rien. Nulle souvenance
dans ma tête. Rien. Dans ma tête, rien.

Sonnet auto-acrostiche d’hémistiches, une contrainte introduite en 2020 par Gilles Esposito-Farèse. Tentative d’exprimer ce que tentait de me faire comprendre une personne proche bien incapable de le dire.
Publié sur la liste Oulipo le 10 janvier 2024.

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sonnet iranien

Mollah qui veut à coups de poings juger du bien,
abhorrant fol qui croit dans son primat joug voir,
puisqu'au genre frivole échoit hidjab avoir,
grave châtie au fouet pied narquois, jeu lesbien.
Qu'à jamais d'un sang chaud flot soit plomb au pouvoir.

Debout chante au jour feu qu'empreint gouailleuse union
de femmes qu'un grand vent brûlant jonche sans peur
quand va surgir, joli spam, brun, châtain, fanion.

Temps déjà, vainqueur fou, change sombre torpeur
en un jeu - presque un vol - où gauche ado flambant
dégauchit sa ferveur, qu'adjure un clan trompeur
d'avachir, qu'un fiqh jugula : stop ! Mis au ban !
Chaque femme d'objet devient puissant dégel.
Quand des bourgeons jaillis fraîcheur mouvra pli bel
fondra chagrin jauni qu'on voit au soir plombant.

Une caractéristique de ce sonnet iranien est… que ce n’est pas un sonnet. Sa structure 5/3/7 est propice à la contrainte de la belle absente où se trouve masqué le slogan du grand mouvement qui en Iran a suivi la mort de Mahsa Amini. Il n’y a pas de rimes féminines, allez savoir pourquoi. Toutefois une alternance phonétique voyelle/consonne est appliquée tant bien que mal. Écrit après avoir vu Marjane Satrapi présenter son nouveau livre à la télévision.
Publié sur la liste Oulipo le 17 décembre 2023.

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Oripeaux

l’escalier

l'escalier montait
jusqu'au seuil d'une porte
la porte s'ouvrait
sur une chambre torte
la chambre sentait
le parfum d'une morte
la morte dormait
pleine de grâce forte

Prendre un architog 5757575. Lui rogner les vers longs. Mettre un vers en trop.
Ça fait un architof ou « archi tanka oulipien frelaté ».
Oui, on pourrait aussi parler de quatrain d’hendécasyllabes.
Publié sur la liste Oulipo le 16 décembre 2023.

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