Catégories
Le prix de la vie

la voyageuse

se posant
près des sources vives
de son aile multicolore
la voyageuse a tiré une plume très belle
accroupie elle la trempe dans des coupes emplies de teintures chatoyantes
cette rémige caresse l’étoffe et bientôt affleurent des coloris limpides que traversent des marbrures mystérieuses

turbulents
les yeux grands ouverts
des groupes d’enfants souriants
s’assoient sous l’arbre immense où se chamaillent des singes
et la voyageuse pince les cordes d'une vina qui résonne sonore

sa chanson
dans l'ombre des branches
s'étire en guirlande joyeuse
sous laquelle ondulent des statuettes de bronze

l’œil riant
les sages les prêtres
tendent leurs mains parlent de paix

au matin
par le vent reprise

s'envola

Peintre, sculpteur, poète, musicienne, ma sœur Florence Rastogi, qui signait Marateste, était l’épouse du peintre Jagdish Rastogi. Elle est décédée le 14 octobre 2025. J’ai composé ce bigollo en pensant à elle. La structure en bigollo est plus visible sur l’image ci-dessous.

Le prix de la vie: précédent – suivant

Catégories
Le prix de la vie

pour Prune Matéo

du pinceau
qu'une main promène
sur une surface rectangle
la couleur paraît vêtue de magies fulgurantes

un visage
est soudain présent
et l'essentiel est dévoilé

la couleur
d'un rire violent

se fait danse

Pour Prune Matéo, peintre et poète, décédée le 19 octobre 2025, un bigollo inspiré par ses œuvres que j’aime beaucoup. Avec mon amitié pour sa mère Nic Sirkis, membre de la liste Oulipo.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie Uncategorized

Pavel Kouchnir

Fol qui Birobidjan voit sans mortel chagrin,
geôle où, bridé, fervent, presque en Chine, homme jeûne.
Du piano chant bloqué jamais gel ne prend foehn
quand csar-vamp fait jaillir sang hors bras, du surin.

Champions d'abjecte guerre on vous moque en refrain.
On vomit tanks, chambard, joug, qu'enfle un game open
quand échappe au jeu gain - meurt fils, bru, vieille, ibn.
Joli combat de coqs gave. On chope le frein.

Voilà que soudain, paf ! Juge brun met haro.
Musique ? - Fi. Bel art ? - provoc. Jardin ? - garrot.
Souffler vrai : beau projet, risque chargé d'amour.

L'homme au grave combat qu'on frappe au sourd donjon
Déjà tombe, apaisant ce glauque fleuve Haine.

Ce « sonnet » en bel absent est un hommage à Pavel Kouchnir, pianiste mort récemment dans une geôle poutinienne à Birobidjan.
Alors que la contrainte de la belle absente ( ou bel absent ) ne permet usuellement de coder que les lettres valant moins de 10 points au scrabble, je code ici le K par un vers où exceptionnellement cette lettre apparaît tandis que sont présentes toutes les lettres valant moins de 10 points. Cette méthode m’interdit, dans les autres vers, l’utilisation d’une lettre à 10 points.
Il manque un vers à la fin : c’est normal, sachant que le héros était achevé. Pour la rime bizarre amour/haine, j’avais au départ pensé mettre le fleuve Amour mais le R est interdit au dernier vers ; une rime en haine est aussi impossible, le N étant prohibé en antépénultième.
Toutefois ces commentaires ne signifient pas que je rejette l’hypothèse d’une mort naturelle, possible puisque ce brillant musicien arrêté pour sa dénonciation de l’agression contre l’Ukraine était en grève de la faim.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie

Vie de Badinter

L'homme est un animal qui tue.
Quel est, sabre, là, ce sang humain ?
La tête s'en va, épave sans écho
de peines et d'appels, d'appétits tus.

Lentement le temps s'efface rigolant.
Des virils instincts s'éteint morgue
et l'infini vide s'emplit tout de
millions d'oiselets mourants. Fin.

Robert Badinter est mort la nuit dernière. Dans ce poème le premier vers  reprend une phrase prononcée par lui lors d’un entretien diffusé dans La Grande Librairie, qui m’avait inspiré deux poèmes le 16 novembre dernier.
https://taliporefleuri.fr/2023/11/21/badinter-1/  et https://taliporefleuri.fr/2023/11/21/badinter-2/
En voici un troisième, suivant la contrainte du jeu de la vie.
Publié sur la liste Oulipo le 9 février 2024.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie

La belle attente

Aujourd'hui qu'on croit gravis surplombs affolants,
vois quel grand effroi jette au mont ample et berceur,
volant, l'aigle au cri froid : tremble jusqu'au chasseur.
Chiffres, virgules, jeux simples bloquent, dolents.
Ton cerveau fuit que plomb gauchit en jais, ma sœur.

Poème en belle absente publié sur la liste Oulipo le 12 décembre 2023.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie

Badinter 2

Plomb !
Fer !
Perdu !
m'apprit la
multitude : nu
je demande grâce, battu.
M'a pris l'âme l'engrenage martelant l'écho
et j'expire net, appelant mes fils brûlés et mes belles errant environ.
Amer l'infini rire de l'infortuné vibrion trop libre, serf dont un matin gris vint trop tôt porter, le tuant, l'estoc.

Lors de l’émission « La Grande Librairie » du 15 novembre, j’ai entendu la phrase « L’homme est un animal qui tue » prononcée par Robert Badinter. Elle m’a inspiré deux poèmes. On retrouvera le premier, à la page précédente.
Le second à la page, présenté ici, est un Fib ( poème dont les vers ont des longueurs égales aux premiers nombres de la suite de Fibonacci 1,1,2,3,5,8…) sur 9 vers, dont la phrase de Robert Badinter a fourni les 11 premières voyelles, les suivantes obtenues en appliquant le jeu de la vie. J’ai en effet constaté que 9 vers du Fib donnent un total de 88 syllabes alors que la mise en œuvre 8 fois du jeu de la vie procure 88 voyelles, ce qui m’a conduit à n’utiliser que des syllabes comportant une voyelle. Voici la suite de voyelles utilisées :

oeeuaiauiue
ueeaeaeauai
aeeeaeaeaeo
eeieeaeaeiu
eeeeeeaeioa
eiiiieeioue
iiooieeouai
iioooeeuaeo 


Publié sur la liste Oulipo le 16 novembre 2023.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie

Badinter 1

L'homme est un
animal qui tue.
Il avait, en disant cela,
le regard du vieux sage qui n'a jamais faibli.
Et sur le trottoir en courant passaient des meutes de héros brandissant des armes.

Tu es un
animal qui tue.
Ses yeux étaient braqués sur moi,
noirs, telle l'âme d'un revolver automatique.

Alors moi,
animal qui tue,
j'ai tourné le dos au miroir.

J'ai soufflé,
animal qui tue,

la bougie.

Lors de l’émission « La Grande Librairie » du 15 novembre, j’ai entendu la phrase « L’homme est un animal qui tue » prononcée par Robert Badinter. Elle m’a inspiré deux poèmes. Le premier, présenté ici, est un bigollo reprenant cette phrase en refrain.
On retrouvera le second à la page suivante.
Publié sur la liste Oulipo le 16 novembre 2023.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie

Paumée, jamais perdue

L'abeille, chaque jour,
butinait cette treille
où toujours l'on soleille
sous les parfums d'amour.

Aujourd'hui, le cœur lourd,
on la voit qui s'effraye :
des ans, qui l'ensommeillent,
elle entend le tambour.

La muse secoureuse,
intrépide et rêveuse,
fit s'ouvrir tant de fleurs !

Vers elle en souvenance
d'élans, beautés, bonheurs,
chaude reconnaissance.

Petit hommage à Brigitte Célérier qui vient d’arrêter son blog Paumée.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie

Refus d’obtempérer

Il est mort
dans une voiture
fusillé par un policier.
C'est le corps d'un enfant que sa mère aujourd'hui cherche.
Autour vocifèrent les tribuns des hordes brunes, les policiers de la haine.

Un enfant
qui, les yeux levés
vers la montagne de la vie,
comme il pouvait gravissait ignorant le vertige.

Il est mort :
que chacun se taise.
Écoutons le vent qui se lève

et qui chante
l'histoire obstinée

de l'amour.

Le 27 juin 2023, un nouveau tir de policier sur un conducteur pour refus d’obtempérer a provoqué la mort du jeune Nahel Merzouk, 17 ans, à Nanterre. Ce bigollo est écrit en réaction à ce drame.
Publié sur la liste Oulipo le 29 juin 2023.

Le prix de la vie : précédent suivant

Catégories
Le prix de la vie

Théorème de l’invisible

Approchant modique bougie      veille jeune fille,
Nue, quand père craint défend maths.      Bravant jeûne et gel,
Tant sa foi juche algèbre en dieu      qu’ombre fuit en vrille,
Ose enfreindre brusque éviction,      joug mis sans appel.
Indécent jeu, bluff au gotha,      phot qu’ombre renverse.
Nom qu’il faut avoir pris d’un gars,      jabot cachant cou.
Empire technique affolé      d’abject corps adverse :
Amphi clos prof hagard jurant      vouloir bru qui coud.

Un vif ajout au lemme abscons      que signa Diophante
Grand but devint, presque infernal.      Chaude conjecture !
Un bien long chemin jusqu’enfin      prouver loi démente.
Savants de grand nom font tomber      chaque jalon. Pente
Toujours qui grimpe obstacles fous      droit vers thèse pure.

Enfiévré tel jars chassant coq      son esprit gambade,
Livre abrupts chocs au mur magique,      au majeur défi,
Et franchit divin jump global      plus haut qu’onc nul fit.
Beau théorème évoquant jongle,      espoir pour décades.
Long cours franchit obscur maquis,      d’ajours non pourvu,
Avant qu’enfin chauds bravi louent      son génial projet.
Naïf éloge acquis hors bord      par vassal sujet.
Coma brusqua fin d’un grand vol.      Haut prix jamais vu.

Le chrysonnet a été défini par Gilles Esposito-Farèse comme un poème formé de 13(5+8) vers de 13 (5+8) pieds; en effet chryso = or et 5,8,13 se succèdent dans une suite célèbre chère à mon esprit vagabond.
Le texte ci-dessous est un Chrysonnet allongé, formé de 21 (13+8) vers, afin de pouvoir placer en acrostiche un nom bien visible. Moins visible est le vrai nom de la personne qui emprunta ce nom pour avoir le droit de mener une recherche majeure en mathématiques. Belle absente, elle figure néanmoins dans ce poème. Comme le vrai nom n’avait que 13 lettres et non 21, j’ai dû le compléter par deux mots respectivement de 3 et 5 lettres: on trouve ainsi 3,5,8,13,21.
Ce poème a un jumeau « Rhèmes de l’invisible » publié simultanément dans le recueil « Oripeaux ».
Posté sur la liste Oulipo le 25 novembre 2012.

Le prix de la vie : Précédent Suivant