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Hommage à François Caradec

Chaque année le site Zazie mode d’emploi honore un Oulipien dont un texte est proposé à toutes les réécritures pendant un an. Cette année l’Oulipien de l’année est François Caradec, dont le texte proposé est le suivant, tiré de son recueil Les nuages de Paris :

Chanson des rues

Prenez une rue au hasard
en sortant de chez soi la première est la bonne
ce n’est pas un effet de l’art
la plus belle à Paris est celle qu’on fredonne.

Toutes les rues riment ainsi
on en fait des refrains qu’on chante dans les rues
toutes les rues disent merci
merci d’avoir chanté la ville disparue.

On trouvera ci-dessous l’ensemble de mes participations à cet hommage, à retrouver sur la page dédiée du site Zazie mode d’emploi.

19-2-2024

Aux brâmes citoyens

Au boulevard choisissez des échappées fantasques :
Gouaille, hardies invites, joyeux klaxons !
Là modulez nocturnes ovations,
prosodies que rues susurrent tendrement.
Unissez vibraphone, waterphones, xylophones!
Yodlez zouavement !

( abécédaire )

19-2-2024

Murs, murs

Aux rues
échois.
Aux nues
le choix.

Passante,
souris
quand chante
Paris.

( muret : variante du sélénet ( autrement dit bobet ) dans lequel chaque vers compte 2 syllabes )

20-02-2024

Merci

Prenez une conscience au hasard
en sortant du Kremlin la première est la bonne
ce n’est que l'enfance de l’art
la plus belle à Moscou est celle qu’on empoisonne.

Toutes les consciences finissent ainsi
on en fait des charognes qu’on traîne dans les rues
toutes les rues leur disent merci
merci d’avoir chanté notre fierté disparue.

24-2-2024

Faisant confiance au hasard
je prendrai la première rue
dans Paris, enfance de l'art,
faisant confiance au hasard.
Et j'errerai, chantant, peinard
dans la grand-ville disparue,
faisant confiance au hasard.
Je prendrai la première rue.

( triolet )

24-2-2024

Prenez Paris

Prenez Paris, plus belle chez soi.
On n'en est plus ainsi chanté.
Ville fait art dans les rues.
Merci hasard avoir chanté, sortant disparue.

Montagnes russes : chaque mot est plus long ou plus court d’une lettre que son prédécesseur ; ici chaque mot est pris dans le texte source.

25-2-2024

Jeu de la rue

Merci avoir chanté la ville disparue, dit l'homme, un homme âgé dont d'informes habits sont unis au ciment gris du long mur gris et long.

Tu vas comme ça, roi sortant d'un manoir nu, chanteur ingénu soulevant l'écu dormant.

Et riant, noir, mauvais : Ne dis ma rue ! dit l'homme, un homme âgé. Mort. Informes habits.

Jeu de la vie à partir du dernier vers du texte source.

Il se trouve qu’à la 6e itération le jeu devient périodique : c’est donc sur cette 6e itération qu’on s’interrompt.

1-3-2024

Accumulation fâcheuse

Déambule en la première ruelle.
Quelle ruelle ?
En Alep ne se trouve ce jour rien qu'un amas de pourriture.

Déambule en la première ruelle.
Quelle ruelle ?
En Avdiïvka ne se trouve ce jour rien qu'un amas de pourriture.

Déambule en la première ruelle.
Quelle ruelle ?
En Gaza ne se trouve ce jour rien qu'un amas de pourriture.

Aaahhh ÇA VA ! Fous nous la paix !

Et si tu veux, égrène un psaume pour ta cité disparue.

Accumulation agréable : comme stipulé par Eric Angelini, tous les mots doivent comporter même nombre de voyelles et de consonnes.

5-3-2024

Airs de Paris

Par aria pair s'apaisa. Paria prisa rap.
Saï passa, surpris, puis, assis pipa air pas si pur.
Repasseuse, éprise, a saisi pipeau. Rire espéra.

Suivant une idée d’Alexandre Carret, ces trois tétradécasyllabes contiennent exclusivement les lettres de PARIS ainsi que, le premier la lettre R, le second les lettres RU, le troisième les lettres RUE.

14-3-2024

Amnésie des rues

Je ne me souviens pas pourquoi le poulet a traversé la rue.
Je ne me souviens pas si le poulet avait pris une rue au hasard.
Je ne me souviens pas si en sortant de chez lui la première fut la bonne.
Je ne me souviens pas que cela ait été un effet de l’art.
Je ne me souviens pas de la plus belle à Paris, ni de celle qu’on fredonne.
Je ne me souviens pas comment riment toutes les rues.
Je ne me souviens pas des refrains qu’on chante dans les rues.
Je ne me souviens pas de ce que disent toutes les rues.
Je ne me souviens pas d’avoir chanté.
Je ne me souviens pas de la ville disparue.

Texte à démarreur, à la manière de « Je me souviens » de Georges Perec.

20-3-2024

Rue, ô sœur !


Égaré tu as su baisser viseur :
Paris tué.
Mélodie vive idole meut.
Si rap, rues ivres.
Si abus, saute rage.

Ce palindrome est la 202e ( nombre palindromique ) contribution à l’hommage à François Caradec.

23-3-2024

Fureur des rues

Tirez dans la rue au hasard
en sortant votre colt l'africaine personne :
ce n'est pas pour rien les pétards.
L'âme belle à Paris est celle qui ratonne.

Toutes les rues riflent ainsi
ces enflés pas chrétiens, qu'on plante dans les rues.
Toutes les rues disent merci
aux preux qui vont planter la racaille accourue.

29-3-2024

Les rimes mortes

Rue aux marchands de vin ? Rue aux marchands de soie ?
Il choisit au hasard, celui qu'on dit Franc.

Les parlers de Bretons, de Goths, de Celtes, d'Èques
riment en ce lieu qui prit tant de carat.

Les rimes voilées ou mortes sont une invention de François Caradec : les vers de rang pair ont une syllabe de moins que ceux de rang impair ; ils sont à compléter par la syllabe à la rime du vers précédent, leur donnant par homophonie une terminaison différente.

5-4-2024

Fugue des rues

Prenez une rue au hasard : la plus belle à Paris est celle qu’on fredonne.

Toutes les rues riment ainsi, on en fait des refrains qu’on chante dans les rues.

Prenez toutes les rues. Une rue rime. Ainsi on fait au hasard des refrains. La belle qu’on chante à Paris est celle qui fredonne dans les rues.

Prenez une rue, prenez toutes les rues. Au hasard rime la plus belle. Ainsi, une rue à Paris fait fredonner des refrains au hasard. On chante la plus belle dans les rues : Paris fredonne.

Toutes les rues se prennent à rimer. Prenez, prenez une rue. Le hasard ainsi fait une rue plus belle. Toutes les rues disent merci au hasard, merci Paris pour la belle rue qui fredonne, pour toutes les rues qui riment au hasard. Ah, Paris qui chante ainsi des refrains que la belle fredonne. Paris, ville qui fait qu'on chante des refrains, qu'on fredonne dans les rues, qu'on chante, disparu dans les rues.

Toutes les rues disent merci, merci d'avoir chanté.

Prenez une rue au hasard. Prenez une rue, prenez la plus belle à Paris, au hasard. Une rue au hasard. La plus belle, la plus belle à Paris, est celle qu’on fredonne, qu’on fredonne à Paris. Celle qu’on fredonne.

La ville ? -- Disparue.

Reprenant ma proposition de fugue introduite en 2019 transposant au domaine de la littérature une forme musicale célèbre. On distingue ici un sujet « Prenez une rue au hasard : la plus belle à Paris est celle qu’on fredonne » , un contre-sujet « Toutes les rues riment ainsi, on en fait des refrains qu’on chante dans les rues » et un second contre-sujet « Toutes les rues disent merci merci d’avoir chanté la ville disparue ».

21-4-2024

Vers sert

Prenez une date au hasard
en venant au printemps à coup sûr c'est la bonne :
N’est ce pas un effet de l’art ?
Le vingt et un avril naît celle qu’on fredonne.

Tous ses haïkus riment verlan
inversant les refrains dont chante la médaille,
tous ses haïkus disent l'envers.
Merci d’avoir créé le rêve qui sonnaille !

Double hommage à l’Oulipien de l’année et à l’Oulipote Annie Hupé pour son anniversaire, avec une allusion à la médaille, contrainte de son invention.

24-5-2024

Avenues, boulevards, calades

Au bon chaland douce errance fleure glorieux hasard.
Ici joyeuse kermesse louvoie, menant nonchalamment où première que repérerez suffira :
trivial univers vomissant walkmans, xylophones, yodles, zouk.
Zieutez-y xystes, wesh ! Voici un très swingant refrain.

Quels poèmes on narre !
Mélodieux les klaxons jouent, ivres, héroïques guimbardes,
faubourgs entonnent dithyrambes.
Chantent bourgade anéantie.

Abécédaire ascendant puis descendant.

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